Ce pays valait vraiment la peine qu’on s’intéresse à lui.
Christiane Berthiaume est venue présenter son ouvrage Le pays du bonheur possible au salon du livre de Genève.
Invitée au Grand Bivouac d’Alberville cet automne, elle n’a malheureusement pas pu venir.
Qu’à ce la ne tienne : on vous propose un petit interview pour faire connaissance et présenter rapidement l’objet de son livre.
Christiane Berthiaume, vous avez eu une carrière riche et travaillé dans de nombreux pays, pourquoi avoir souhaité écrire et publier un livre sur le Bhoutan ?
La première fois que je suis allée dans ce pays, c’était en pure touriste. J’avais envie de connaître cet endroit mystérieux, caché dans les plus hautes montagnes du monde. Je pensais faire un beau voyage, inspirant, voir de beaux paysages, visiter de splendides monastères.
Une fois sur place, ce pays a commencé à m’intriguer. J’avais entendu parler de ce principe d’index économique baptisé « Bonheur national brut » qui met le bien-être de la population en première ligneet qui a plus d’importance que le fameux Produit intérieur brut qui calcule l’évolution d’un pays uniquement, ou presque, sur sa croissance économique. Je pensais que c’était un gadget. Et puis j’ai réalisé que ce BNP était quelque chose de très sérieux et je voyais bien également que ce pays qui avait été très, mais très pauvre, était sorti du Moyen-Age en l’espace de quelques décennies et avait tiré sa population de la pauvreté alors que d’autres pays pauvres échouent malgré les aides au développement.
Mon travail comme journaliste m’a effectivement amenée dans de nombreux pays pauvres et j’en partais à chaque fois découragée, me demandant pourquoi ces pays ne réussissent pas à sortir de leur marasme. Je ne suis pas naïve. Je sais bien que ces échecs ont de multiples explications, souvent géopolitiques. Le Bhoutan n’y échappe pas, non plus. Après tout, cela n’est pas confortable de se trouver coincé entre deux géants politiques que sont la Chine et l’Inde. Et pourtant… J’ai voulu comprendre, savoir, pourquoi ?
J’y suis retournée, j’ai eu la chance d’y travailler. J’ai beaucoup lu. J’ai rencontré beaucoup de gens, parlé avec des Bhoutanais et j’en suis sortie convaincue que ce pays valait vraiment la peine qu’on s’intéresse à lui.
Vouliez-vous montrer quelque chose, passer un message ?
Oui, pour moi, ce pays est une lueur d’espoir.
Je ne suis pas la seule à être déçue et surtout découragée par ce qui se passe dans le monde. Certains dirigeants de la planète « jouent » dangereusement avec le sort du monde, bafouent les règles internationales que nous avons mises en place avec tant d’espoir après la Seconde guerre mondiale. Pour leur propre intérêt égoïste, ils n’ont aucun remord à faire la guerre, à sacrifier des femmes, des hommes, des enfants, des innocents qui ne souhaiteraient qu’une chose : vivre en paix.
Stefan Zweig écrivait : « L’histoire, c’est comme la mer. Les vagues avancent, puis reculent. » Je ne suis pas la seule à penser que nous sommes dans un creux de vague et que c’est terrifiant.
Or, dans ce monde, il y a cette petite lueur d’espoir. Le Bhoutan n’est pas un pays parfait, mais il a eu et a toujours la chance d’avoir à sa tête des dirigeants intelligents qui ont mis, et mettent, le bien-être de leur population avant leurs intérêts personnels. Dans ce monde qui nous désespère, cela devient une exception qui vaut la peine d’être soulignée, ne serait-ce pour ne pas nous faire perdre l’espoir que les vagues vont revenir et avancer.
Voilà ce que j’ai voulu raconter, que tout espoir n’est pas perdu. Je souhaite, bien sûr que le Bhoutan continue dans cette voie. Cela fait tellement de bien.
Quel accueil recevez-vous des lecteurs ?
Je pense que la meilleure façon de vous répondre est de vous citer quelques commentaires récoltés sur le web : « Voilà une lecture vivifiante, qui invite à la réflexion et donne envie d’aller plus loin aussi bien symboliquement par d’autres lectures, que concrètement par le voyage » ; « Découvrir le Bhoutan à travers le récit de Christiane Berthiaume est à la fois séduisant et riche d’enseignement » ; « L’auteur sait nous faire plonger dans la vie quotidienne du pays car elle va au plus près des hommes et des femmes qui y vivent. Le livre n’est pas ennuyeux un seul instant. La lange est vivante et sait nous rendre le pays attachant » ; « Christiane Berthiaume m’a fait découvrir beaucoup de choses et amené une réflexion sur mon mode de vie ».
Cette première publication vous a-telle donné envie de reprendre la plume ?
Oui et même avec plaisir. L’écriture de ce livre sur le Bhoutan m’a demandé des efforts auxquels je ne m’attendais pas. Après tout, je suis journaliste. En principe, écrire devrait m’être facile. Eh bien, non ! Ce n’était pas aussi simple que cela. Il a fallu apprendre à me défaire de mes tics journalistiques et cela n’a pas été évident au premier abord. J’ai même jeté au panier une première ébauche pour recommencer à neuf parce que cela ressemblait trop à un long article de magazine froid et anonyme. J’ai dû découvrir à dire « je ». Pas évident lorsqu’on a appris à mettre en pratique une façon d’écrire le plus objectivement possible, sans s’impliquer, encore moins émotivement. J’ai dû apprendre, justement, à transmettre ma perception personnelle de ce petit pays au fin fond de l’Himalaya qui grandit si bien. Cela n’a pas été un exercice facile. J’ai jeté plusieurs textes à la poubelle avant de m’adapter à cette nouvelle forme d’écriture. Forte de cette expérience, je me suis dit que ce serait plus facile pour le prochain livre. Mais je n’en suis pas certaine… c’est probablement une illusion. A chaque ouvrage suffit sa peine !
LE PAYS DU BONHEUR POSSIBLE – Christiane Berthiaume
Le Bhoutan, petit pays pauvre enclavé dans l’Himalaya ayant longtemps vécu en quasi autarcie, a fait le pari, depuis quelques dizaines d’années, de s’ouvrir au monde tout en restant fidèle à ses traditions. Il se développe à sa manière, en basant sa croissance davantage sur le principe du Bonheur national brut, que sur le sacro-saint Produit intérieur brut, et fait du bien-être de sa population, sa priorité. Ce pays est en train de réussir là où bien d’autres ont échoué. Pourquoi ? Quel est le secret du Bhoutan ?
Christiane Berthiaume est journaliste canadienne. Elle a travaillé comme correspondante à l’étranger au Proche-Orient et à Genève pour le compte de médias canadiens, suisses et français avant de rejoindre le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et le Programme alimentaire mondial à titre de porte-parole et responsable de l’information. Elle vit en France.

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